Début de WE

Il était seize heures trente passé lorsque Ran se retrouva devant le portail de son établissement où un taxi l'attendait. Comme tous les weekends où elle n'avait pas cours le samedi matin, elle allait rentrer au domicile familiale en abandonnant pour quelques jours son confortable appartement de Ginza. Comme d'habitude, elle avait pris soin d'appeler le taxi la veille afin que celui-ci vienne la chercher directement à l'école à la fin des cours. Elle n'avait pas besoin de retourner à son appartement car elle amenait avec elle le matin même ceux dont elle avait besoin pour le weekend : quelques livres scolaires, les cours à réviser et les devoirs à faire.

- konbanwa Monsieur Yamada.

Adressa-t-elle au chauffeur, alors qu'elle prenait place sur la banquette arrière de la voiture.

- konbanwa, Ran-San. Vous êtes de plus en plus jolie.

- Arrêtez de me taquiner et avancez plutôt je vous prie.

Des élèves commençaient à lancer des regards froids dans leur direction. Beaucoup d'élèves de son établissement la détestaient parce qu'ils jugeaient qu'elle n'avait pas sa place au sein de cet établissement. Il faut dire que Ran était la seule élève issue d'une famille aisée qui fréquentait le lycée Maten Gaken, qui était plutôt un établissement destiné aux mauvaises graines, des élèves qui n'ont pas réussis à percer dans les autres établissements. Alors que faisait une fille riche, et intelligente de surcroît, comme elle dans ce genre d'établissement ? "Pour jouer la snob" disaient certains de ses camarades mais Ran avait ses raisons personnelles : elle voulait être avec ses amies kogals qui fréquentaient Maten Gakuen mais aussi parce qu'elle avait un peu marre d'être traiter en fille des riches. Il s'avère que cette petite rébellion lui coûte assez chère mais Ran, comme tous les autres membres de sa famille, n'était pas du genre à abandonner, une fois qu'elle avait décidé de faire quelque chose, elle y allait jusqu'au bout.

Sans attendre un mot de plus de la part de la jeune Sakurai, Monsieur Yamada démarra et fraya un chemin entre la foule d'élèves qui prenaient direction vers leur maison respective. Monsieur Yamada était un homme d'un âge assez avancé, quelques cheveux gris ornaient déjà son crâne qui était encore pourtant couvert des cheveux encore assez abondants. Depuis que Ran fréquentait le lycée Maten Gakuen, elle avait toujours contacté Monsieur Yamada pour l'amener quelque part, et cela dure plus d'un an maintenant. Depuis, il s'est installée comme une sorte de complicité entre eux malgré leur différence d'âge.

Le trajet se fit sous une conversation amicale et anodine comme d'habitude. Une fois la voiture s'arrêta devant la maison principale de la résidence des Sakurai, Ran descendit, après avoir donné la somme qu'elle lui doit à Monsieur Yamada et en lançant un "arigatô" suivit d'un "sayonara" avant de claquer la portière et se diriger vers l'entrée principale de la grande maison. Comme d'habitude aucune des voitures des parents ni celle du grand frère n'était dans la grande cours.

- Tadaima !

C'était une habitude car elle savait très bien que personne ne viendrait l'accueillir. Chez les Sakurai on ne faisait pas attendre une personne inutilement devant la porte comme le faisait des nombreuses familles riches, par contre une personne prête à vous servir n'était jamais loin, si on avait besoin de quelque chose il suffisait d'appeler assez fort et une fille en robe noire avec des dentelles blanches apparaissait aussitôt pour vous servir.

Une fois ses chaussures enlevées, la jeune Sakurai monta à l'étage, pénétra dans sa chambre et se précipita aussitôt sous la douche, après avoir balancer son sac sur le lit, en laissant trainer son uniforme et ses loose socks sur le sol, juste à côté du grand sommier. Ran était une fille propre mais assez bordélique. Une fois sa douche prise, elle se vêtit d'une jupe assez froufrou blanche lui arrivant juste au-dessus des génoux, d'un haut rose et des leggins assortis avec son haut. Ainsi vêtue, elle ressemblait à une poupée. Elle se jetta ensuite sur son lit, attrapa son sac d'où elle sortit son portable. Elle envoya quelques mails à ses amies puis balança son portable à côté d'elle avant d'enlacer un des ses confortables coussins. Des minutes se coulèrent quand elle fit réveillé par un bruit des pas dans le couloir. Elle attendit encore un moment avant de se précipiter hors de sa chambre et frapper à la porte de la chambre voisine.

- Oniichan ! Je peux entrer ?

Cela faisait près qu'une semaine qu'elle n'avait pas vu son grand frère et elle avait beaucoup de choses à lui raconter.

Ran attendit sagement derrière la porte, on ne sait jamais, peut-être que grand-frère était entrain de se changer. Elle entendit ses pas se rapprocher et la porte glissa pour laisser apparaître grand frère Taro et son visage souriant. La jeune gal répondit à son sourire avant de se précipiter dans la pièce et s'assoir sur le lit du grand-frère. Il y avait bien sûr de quoi s'assoir dans la chambre mais Ran avait prit la mauvaise habitude de s'assoir sur le lit de son grand frère comme si c'était le sien. Ran sautait même dessus quand elle était plus jeune mais elle n'était plus d'âge à faire de chose pareille, du moins pas sur le lit de son frère car il lui arrivait encore de sauter sur le sien, heureusement que le sommier était de la très bonne qualité car sinon ils auraient dû déjà le changer plusieures fois, du moins les lattes.

Ran remarqua que le drap qui couvrait le lit était légèrement froissé et elle en déduisit que grand-frère a dû se reposer dessus et qu'elle l'avait surement fait lever de son confortable place.

- J'espère que je ne t'ai pas déranger grand-frère ? J'aurais dû peut-être te laisser te reposer, tu dois être fatigué ...

Ran baissa un moment le regard car elle se sentait un peu coupable. Grand frère travaillait vraiment dur dans la semaine, en plus de ses cours, elle devait donner des coups de main au siège social de leur entreprise.

- Tu sais j'avais vraiment envie de te voir. Tu n'es pas venue me voir de la semaine ...

Une excuse bidon car elle aussi, elle aurait pu se déplacer pour aller le voir mais elle ne voulait pas que grand-frère lui en veut de l'avoir déranger.

Ran suivit des yeux son grand-frère qui s'installa à côté d'elle, sur le lit. Il lui rassura qu'elle ne le dérangeait pas. Ran savait que même si Oniichan préférait se reposer plutôt que de bavarder avec elle, il ne lui dirait pas. La jeune Kogal savait que son frère adorait la faire plaisir et il faisait tout pour ne pas la vexer. Bien que Ran appréciait l'attention qui lui témoignait son grand-frère, elle aimerait bien qu'il lui dise la vérité si jamais quelque chose le dérangeait vis à vis d'elle. Elle n'était pas vraiment une fille chiante, comparée à certaines, mais tout le monde pouvait se comporter comme un "boulet" et elle ne voulait pas en être un pour son grand-frère, ni pour qui que ce soit d'ailleurs.

"Alors, comment s'est passée ta semaine, oneisan?"

La jeune fille replia ses jambes tout contre elle et les entoura de ses bras. Dans cette position, elle avait les pieds sur le lit, encore une de ses mauvaises habitudes. En plus ce n'était pas vraiment une position à adopter lorsqu'on portait une jupe mais vu que grand-frère était assis à côté d'elle, il ne pouvait pas donc voir sa petite culotte tant qu'elle tenait sa jupe bien en place.

- J'ai rencontré une fille vraiment intéressante, elle s'appelle Sawato Himiko et il paraît que son père est un célèbre écrivain, tu dois le connaître toi qui lis beaucoup... Je vais peut-être l'inviter un de ces jours.

Ran fixa son frère qui lui répondit, après quelques secondes de réflexion, qu'il faisait plus attention aux titres des livres qu'il lisait qu'à leurs auteurs, sauf si c'était un auteur dont il a apprécié le style de roman. La jeune kogal a mit quelques secondes pour comprendre ce que son frère essayait de lui dire. Elle n'était pas conne mais seulement, elle trouvait que son frère s'exprimait d'une façon bien compliquée pour elle, surtout que là, elle n'était pas vraiment concentrée sur leur conversation. Elle avait la tête plutôt vide, comme ça lui arrivait de temps en temps, quand elle voulait se détendre. Dans ce moment là, il lui arrivait même de faire des choses dignes d'une gamine : danser toute seule, se prendre pour une star en chantant devant son miroir en se servant de sa brosse à cheveux comme micro, ou encore sautiller sur son lit...

"Sawato Akira, c'est possible? Par contre, je ne me souviens plus vraiment de ce qu'il a pu écrire. C'est lui que tu voudrais inviter, ou sa fille?"

En voyant son grand frère dans sa position de forte concentration : les coudes sur le haut des génoux, les doigts entremêlés, tandis que ses pouces pinçaient le bout de son nez, Ran sourit et se pencha pour mieux le voir, laissant pendre ses jambes sur le bord du lit et déposant ses mains, à plat sur le matelas, de chaque côté.

- Tu sais que tu fais peur comme ça oniichan, on dirait la statue du "Le Penseur".

Ran souriait toujours puis elle redevint sérieuse au bout d'un moment et balança tout doucement ses jambes.

- C'est pas grave si tu ne connais pas le père d'Himiko-chan. Au fait c'est elle que je voudrais inviter. Tu pourrais alors lui demander des informations concernant son père si tu veux... Au fait ça te dirait qu'on parte quelque part ensemble pendant le Golden Week ?

Le Golden Week débutait le vingt neuf avril et se terminait le cinq mai, pendant cette période la plus part des japonais ne travaillaient pas et profitaient de ces jours fériés pour partir en vacances en famille. Mais les vacances étaient une luxe que la famille Sakurai s'offrait rarement, excepté bien sûr pour Ran qui ne manquait pas une occasion pour partir quelque part avec au moins une de ses amies. Elle proposait quelques fois à son frère de venir avec elle mais c'était rare qu'il le pouvait car les parents lui confiaient toujours quelque chose d'importante à faire.

Ran écouta attentivement son grand frère lui expliquer qu'il serait ravi de faire connaissance avec Himiko mais qu'il éviterait de lui poser trop de questions sur son père. Chose que Ran comprenait parfaitement, beaucoup des gens n'aimaient pas qu'on leurs dérange pour apprendre des choses sur quelqu'un d'autre, surtout que son frère était du genre à poser des tas de questions lorsqu'il était lancer sur un sujet qui lui tenait à cœur et dont il aimerait en apprendre d'avantage. La jeune fille sourit, amusée par le côté prévenant de son frère, c'était une de ses qualités qu'elle appréciait. Puis il enchaina en disant qu'il était partant pour partir avec elle durant le Golden Week. Elle avait l'habitude d'entendre ce genre de propos mais au final il ne pouvait pas venir mais elle ne lui a jamais voulu car ce n'était pas sa faute. Mais Ran pensa que de temps en temps, il devrait se rebeller un peu et cesser d'obéir aux parents au doigt et à l'œil mais jamais elle n'oserait lui souffler ce genre d'idée dans la tête. Son grand-frère était l'héritier idéal pour ses parents, contrairement à elle. Elle se demandait même parfois si les parents ne lui confiait pas des tâches qui normalement devraient revenir à la petite sœur. Même si ceux-ci ne semblaient pas vraiment en vouloir à leur fille, ils auraient sans doute aimer que celle-ci s'intéresse un peu plus à la vie de leur compagnie. Au fait tout le monde semblait croire que Ran ne s'intéressait pas du tout à l'avenir des affaires familiales mais c'était faux. Elle sait que trop l'importance de l'héritage familial et elle voulait contribuer à sa prospérité mais seulement elle doutait de ses capacités, ce qui la poussait à se reposer sur son grand-frère mais la jeune femme commençait à se rendre compte que ceci commençait sérieusement à lui peser. A son âge il devrait sortir et s'amuser un peu plus.

- Tu seras obligé de venir cette fois-ci. Je convaincrais les parents s'ils ne veulent pas. Sinon je pourrais toujours te faire kidnapper ...

Ran ne parlait pas sérieusement en parlant du kidnapping mais elle était capable de le mettre en exécution s'il le fallait. Il suffisait de payer deux ou trois personnes, amener grand-frère à un endroit isolé et le tour sera jouer.

"Au fait, le Penseur de Rondin ne se sert que d'un bras, et il s'appuie simplement le menton sur un poing recourbé, un peu comme ça."

Ran frappa amicalement sur la tête de son grand frère.

- Baka !

Puis elle se leva et défroissa sa jupe avant d'arranger son haut.

- Je crois qu'il est temps de descendre.

C'était bientôt l'heure de passer à table.

"Me faire kidnapper? Mais les kidnappeurs sont en congés, durant le Golden Week."

Ran cessa d'arranger ses vêtements et fixa son frère avant d'afficher un sourire pas très honnête.

- Tu crois ? ... Grand-frère, je crois vraiment que tu devrais essayer de sortir un peu plus et découvrir le vrais monde ...

Sur ce elle sortit de la pièce et descendit pour rejoindre la grande salle à manger en faisant un petit détour dans la cuisine pour aller nettoyer ses mains. Lorsqu'elle rejoignit sa place autour de la grande table à manger, où ses parents étaient déjà correctement installés. Il y a quelques années, elle se serait d'abord jeté au cou de son père pour lui exprimer à quel point il lui avait manqué avant qu'on l'expédie à sa place mais elle avait passé l'âge de se comporter ainsi lui avait dit sa mère. Cette dernière était beaucoup plus sévère que l'homme de la maison et bien que Ran l'aimait autant que son père, elle n'était jamais très familière avec elle. Non pas parce qu'elle ne le voulait pas mais celle-ci lui faisait comprendre qu'elle ne souhaitait pas de ce genre de comportement. Ran avait l'impression que sa mère préférait Taro à elle et cela lui faisait un peu souffrir mais elle la comprenait parfaitement. Elle n'était pas vraiment la fille modèle qu'elle avait souhaité ...

Une fois installée, elle resta silencieuse en attendant que les parents débutent un sujet de conversation et comme d'habitude ce fut son père le premier à ouvrir la bouche en demandant à elle et son grand-frère, comment c'était passé leur semaine. Comme à la coutume, elle répondit que tout s'était bien passé en ajoutant qu'elle avait rencontré une fille nommée Sawato Himiko mais sans rentrer dans le détail.

- Je suppose qu'elle est comme tes autres amies ? Lança sa mère.

Par "tes autres amies" elle voulait parler de ses amies kogyaru que sa mère tenait pour responsable du comportement "rebelle" de sa fille.

- Non mère... Il semblerait que que son père soit un célèbre écrivain.

- Vraiment ? Quel est donc son nom ? Demanda le père.

- Akira Sawato, si je me souviens bien.

Le père sembla réfléchir, sans doute était-il entrain de chercher qui était l'écrivain mais sans attendre un commentaire de plus, Ran commença à entamer le repas qui était servit entre temps. Au bout d'un moment elle leva la tête de son assiette et regarda tour à tour son père et sa mère avant de lancer :

- Je voudrais partir quelque part avec grand-frère durant le Golden Week ...

Ran avait remarqué le sourire en coin qu'affichait son grand-frère alors qu'elle annonçait le nom du l'écrivain, le père de sa nouvelle amie. Elle avait une vive envie d'élargir son sourire avec un doigt dans chaque recoin de sa bouche mais elle se contenta de lui lancer un regard qui en disait long. Elle n'avait rien contre son frère, au contraire elle l'adorait, pour elle il était le plus beau et le plus intelligent des garçons du monde, c'était d'ailleurs la raison qui la poussait à le taquiner comme elle le faisait. Jamais encore elle ne s'était vraiment pris la tête avec lui; même si elle trouvait certains de ses gestes ou dires déplacés, elle n'arrivait pas vraiment à se mettre en colère contre lui, la plus part du temps elle se contentait de le frapper gentiment ou encore de lui bouder comme une petite fille malgré son âge. Par moment, face à lui, elle avait l'impression d'être restée la petite fille capricieuse d'il y a plus de cinq ans mais cela ne lui déplaisait pas vraiment. Comme à présent elle savait qu'il se moquait gentiment d'elle à travers son sourire car ne sachant pas le nom complet du père d'Himiko, elle avait sorti à ses parents le nom qu'avait évoqué son grand-frère lors de leur entretien dans la chambre, alors que lui même n'avait pas la certitude de l'exactitude de ce fait.

A sa grande surprise, son père ne refusa pas catégoriquement sa demande comme elle s'y attendait, mais se contenta d'énoncer une phrase qui lui laissa une lueur d'espoir; avec un peu d'insistance, elle va peut-être pouvoir le convaincre, du moins si la mère ne s'en mêlait pas. Son espoir s'agrandit lorsque son frère vint à son secours en essayant de convaincre le père lui aussi.

*Je t'adore onii-chan*

- Oui père, on gardera nos deux portables allumés et on essayera de revenir le plus vite possible si jamais vous avez besoin de nous.

Elle avait dit "nous" bien qu'elle savait que jamais on l'appellerait pour qu'elle vienne leurs donner un coup de main à l'entreprise mais c'était sa façon de dire qu'elle était aussi disponible pour aider si besoin. Le père sembla réfléchir mais sa réflexion fut interrompu par l'intervention de la mère :

- Laissez-les partir ! Après tout notre fils a besoin d'un peu de repos... Vous comptez aller où ?

La jeune fille n'en croyait pas ses oreilles et on pouvait lire clairement de la surprise sur son visage. C'est vrais que sa mère était une femme assez mystérieuse avec qui on pouvait s'attendre à tout mais tout de même ... elle ne s'attendrait pas du tout que ce soit elle qui lui accorderait la faveur qu'elle avait demandé.

- Heu ! En Corée je pense !

Ran eu un petit moment d'hésitation car bien que la Corée était un pays frontalier avec le Japon, ils allaient toute de même partir à l'étranger en allant là bas et elle avait donc peur que ses parents reviennent sur leur décision.

- Soit ! Mais restez joignable en cas où ...

Lança le père au bout d'un moment. Ran poussa alors un grand souffle de soulagement qui attira tous les regards sur elle, se sentant gênée, elle baissa alors légèrement la tête tout en remerciant ses parents avant de terminer son assiette. Elle avait hâte que le diner se termine pour pouvoir laisser exploser sa joie ...